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Quand respirer devient mortel

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Message par Baalberith Jeu 19 Juin 2008 - 16:57

Le plus gros désastre sanitaire en Chine n’est pas le récent tremblement de terre qui a ravagé la province de Sichuan. Ce séisme a tué au moins 60 000 personnes, mais chaque année, entre 300 000 et 400 000 autres meurent prématurément et en toute discrétion des effets de la pollution de l’air, indiquent les études réalisées par des agences tant chinoises qu’internationales.



Ainsi, tous les deux mois, la pollution de l’air fait autant de victimes en Chine que le dernier séisme, et le problème devient mondial : de la même façon que les Californiens peuvent trouver dans leurs magasins des chaussures chinoises, ils peuvent trouver dans leur ciel des brumes fabriquées en Chine.



Les Jeux olympiques à Pékin cet été seront la vitrine de la plus remarquable explosion économique de l’histoire et aussi de la plus importante pollution de l’air et de l’eau au monde.



Nicholas D. Kristof, auteur de l’article, explique être retourné dans le village de Badui, situé sur le fleuve Jaune, dans la province de Gansu à l’Ouest de la Chine, qui le hantait depuis sa première visite une décennie plus tôt.



Badui est connu localement comme le « village des idiots » à cause du grand nombre de retardés mentaux, de naissances défectueuses, de maladies de peau et de difformités physiques dans sa population. Les habitants de Badui sont convaincus que cette situation résulte des effluents que l’usine de fertilisants voisine rejette dans l’eau qu’ils boivent.



« Même si vous avez peur, vous êtes bien obligé de boire », explique Zhou Genger, mère d’une jeune fille mentalement retardée et déformée.



La Chine rurale est ainsi parsemée de « villages cancers » résultant de la pollution par les usines voisines. L’air de Pékin même présente parfois une concentration de particules quatre fois supérieure à celle considérée comme tolérable, sur le plan sanitaire, par l’OMS.



Les scientifiques ont étudié le parcours des nuages de pollution dérivant au-dessus du Pacifique jusqu’à la côte Ouest de l’Amérique. Leur impact sur la santé des Américains n’est pas connu.



Il faut reconnaître pourtant que la Chine s’est montrée meilleure que nombre d’autres pays pour infléchir sa pollution, portant bien plus tôt que les États-Unis, l’Europe ou le Japon, son attention sur l’environnement. Dès 2004, le pays a ainsi adopté des normes d’économie de carburant nettement plus sévères que celles que l’administration Bush n’était disposée à accepter à l’époque.



La ville de Shanghaï fait par exemple payer jusqu’à 7 000 dollars pour une plaque d’immatriculation, réduisant ainsi le nombre de véhicules en circulation, et la Chine a planté des millions d’arbres et largement étendu l’usage du gaz naturel afin de réduire ses émissions. Si vous regardez ce que font les dirigeants chinois en la matière, vous vous prenez à rêver que le président Bush en fasse seulement la moitié.



Mais si vous voyez la brume chinoise, alors, vous désespérez.



Le boom économique a apporté ces dernières années une amélioration substantielle des niveaux de vie, mais le tribut sur l’environnement est cruel. Les gens protestent contre la saleté mais le gouvernement a étroitement muselé les organisations de la société civile qui pouvaient contribuer à surveiller la pollution et la garder sous contrôle.



Ainsi l’activiste Wu Lihong sonnait l’alarme depuis des années au sujet des menaces planant sur le lac Tai, le troisième plus grand lac d’eau douce de Chine, empoisonné par les usines chimiques installées sur ses berges. Ses alarmes se sont révélées justifiées quand le lac, complètement eutrophié, s’est rempli de toxines l’été dernier, peu de temps après que les autorités avaient condamné Wu Lihong à trois ans de prison.



À Badui même, la situation est à l’image du développement chinois. Le gouvernement est entré en action depuis la dernière visite de M. Kristof : l’usine de fertilisants est supposée ne plus rejeter ses effluents [dans le fleuve Jaune] et le village est approvisionné en eau théoriquement pure. Les villageois n’y croient pas vraiment mais reconnaissent que leurs problèmes de santé ont diminué. Le développement économique a également atteint Badui, qui est toujours pauvre, avec un revenu moyen annuel de cent dollars, mais au lieu de la piste où l’on ne passait qu’à pied dix ans plus tôt, il est aujourd’hui desservi par une route de terre qui accroît les opportunités économiques. Les paysans ont creusé des bassins pour élever du poisson qui est vendu sur les marchés. Mais l’eau de ces bassins est prélevée sur le fleuve Jaune, juste en aval de l’usine de fertilisants. « On mange nous-mêmes de ces poissons. On s’inquiète des polluants chimiques, mais il faut bien manger », explique le maire du village.



Ces poissons élevés en eaux douteuses sont aujourd’hui vendus aux habitants sans méfiance de la ville de Lanzhou.



Les complexités et les ambiguïtés de ces progrès montrent un aspect des ombres jetées sur le développement économique de la Chine.



The New York Times, supplément du Monde, 31/05/08, p. 2
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